(1) La 1ère Pierre

[Tyrael]

Tyrael regagna son vaisseau, avec toujours le même "valet" qui le suivait. Une fois devant l'Asguanote, Tyrael remercia le servant de sa présence, et le congédia. Seul avec son magnifique vaisseau, conçut par ses techniciens, et quelques assistances robotiques, il contempla ce magnifique bijoux, à la pointe de la technologie actuelle. Du moins, celle de sa planète.

Il sortit de sa poche une télécommande d'un bleu transparent, et pressa le bouton central en direction du vaisseau. Immédiatement, la plate forme d'embarquement se baissa lentement, laissant entrevoir le SAS de décontamination, passage nécessaire afin de rentrer dans ce vaisseau. Il s'y engagea le coeur léger.

L'Asgaunote quitta l'Air Plane quelques minutes après l'entrée de l'empereur dans le cockpit. Sans même se douter que son hote allait reprendre le cours de la situation Tyrael s'embarqua en commande manuel, vers sa planète, situé à quelques heures de celle ci, seulement.

Bien calé sur son siège en cuir, Tyrael regardait le ciel étoilé défiler sur la grande baie vitrée faisant office de pare-brise, lorsque tout d'un coup, un voile noir passa devant ses yeux, avec ce sentiment de tomber en arrière.

Pas maintenant, enfoiré, pas maintenant

Il avait beau cligner des yeux, le voile noir devenait toujours de plus en plus fréquent. Il lâcha les commandes du vaisseau et appuya sur un bouton, sans pouvoir voir quoi que ce sot, espérant que ce soit celui du pilotage automatique, et non pas d'une autre fonction. Un bip retentit. Il entendit la voix robotique de l'ordinateur, comme un écho lointain, toujours lointain. Il allait tomber dans les pommes. Ses deux mains prirent son visage et se griffa le plus profondément possible. Il gémit et tout d'un coup, tout redevint normal.

Sa vue réapparut. Il comprit qu'il était tombé de son siège pendant qu'il tentait de reprendre ses esprits. Il allait devoir palier a ce problème. Et dans les plus brefs délais.

Tyrael laissa les commandes en automatique, et partit dans la salle de bain se nettoyer le visage, avant d'aller dormir.

[Tyrael]

Le lit trembla légèrement, le ronronnement des moteurs et des turbines diminuèrent, ses yeux s'ouvrirent : il était enfin arrivé. En tournant la tête il vit qu'il lui avait fallu trois heures, au lieu de deux heures dix, pour revenir. Le mode automatique était couplé en sorte de consommer peu, mais il allait moins vite.

Tyrael entreprit de se lever, se recoiffa, puis sortit dans son grand hangar. Les portes se fermèrent un dans un claquement sec. Il garda la boîtier de commande sur lui, ouvrit la porte et pénétra dans un couloir tout en parquet ciré. Sa demeure lui avait tellement manqué. Apres un bâillement sonore, il marcha vers les sous sols et prépara l'arrivée de son nouvel arrivant.

[ereben]

Ereben passa un temps à réfléchir sur le siège de l'hôte de la Salle des Alliances. Bon diplomate, peu de guerres avaient été déclarées sous son règne dans cette salle qui portait donc bien son nom. Pourtant sa confiance semblait soudain faiblir. Il sentait arriver quelque chose de sombre.

Son secrétaire, celui que Tyrael se plaisait à nommer "valet", entre dans la salle. Ereben lui fit signe de s'assoir sur l'un des deux sièges des convives. Ce qu'il fit sans se faire prier. Cela signifiait pour lui l'autorisation de se comporter comme l'ami et non le collègue et subordonné du roi.

"Qu'est-ce qui te tracasse, Ereb ? demanda Laetim.
- Je sais pas... Tyrael se comporte bizarrement. On dirait que... depuis cette histoire de frère dont il ne m'avait jamais parlé...
- Il a changé...
- Oui. Il est bien plus... calculé et...
- Condescendant."

Il regarda son ami et collègue - car il ne laissait court à ce genre de hiérarchie uniquement pour ne pas se farcir les foudres des royalistes, majoritaires sur Nilufer -, un peu surpris par le ton et la précision avec laquelle il avait trouvé ce mot. Il se rendit compte qu'effectivement, il était en première ligne pour s'apercevoir de cette facette de la personnalité des invités diplomatiques qui le considéraient pratiquement tous comme... eh bien comme un "valet"...

"Tout à fait, répondit alors Ereben en se levant lourdement de son fauteuil. Leatim, s'il-te-plait, fais quérir Kaptue.
- Tu lui cèdes l'Intendance ?
- Oui.
- Le meilleur choix.
- Je sais, le meilleur choix, sauf toi, mais...
- N'essaye pas.
- OK, OK..."

Ereben sortit de la Salle des Alliances pour se diriger vers ses appartement. Ceux-ci étaient situés au dernier étage, le 34ème, de la Tour du Roi, ainsi nommée dans l'urgence après le Putsch de 1204 qui à la suite de diverses péripéties vit Ereben propulsé au pouvoir à vie. La Salle des Alliances était au 30ème, relativement proche du sommet, ce qui avait pour vocation, de même que cette appellation, de flatter les conviés en leur donnant une impression de confiance.

[ereben]

Ereben sortit de l'ascenseur du 1er sous-sol suivi par Laetim. Kaptue l'attendait dans une voiture gouvernementale parquée juste devant. Laetim ouvrit la portière et Ereben entra.

Alors que la voiture se dirigeait vers le spatio-port de Cardya Nord, Ereben fit part à Kaptue des modalités importantes. Ce sera lui l'Intendant pendant son absence, celui qui gouvernera à sa place.

"Les Exodistes te mettront la pression, ils sont tous persuadés que Aylin est la réponse à toutes les attentes de chaque tranche de population. Si on les écoutait, il y aurait d'ici deux ans plus gens sur Aylin que sur Nilufer avec 4 fois moins de superficie continentale. Mais ils sont persuadés que l'équilibre se fera tout seul sans dommages. L'Histoire ne leur a pas servi de leçon. En 70, quand Serru le Généreux a déclaré unilatéralement que la péninsule de Kelm faisait désormais partie de son royaume, et qu'il a laissé aller l'Exode, ça l'a mené à sa perte...
- Donc je dois quoi, leur expliquer gentiment ?
- Non, non, ils se cabreraient et s'offusqueraient de cette comparaison déshonorante... Dis-leur que pour le moment pour des raison de sécurité interplanétaire, il n'est pas question de peuplement de masse. Par extension, c'est la vérité, et la presse pourrait gober ça si on l'emballe bien."

Kaptue rit.

"Par contre, au niveau des sécessionnistes de Derred... Je sais pas.
- Tu as déjà pensé à... tu sais...
- Leur accorder l'autonomie ? Oui... je dois même te dire que je suis totalement d'accord avec eux, sur toute la ligne... Le problème c'est qu'il y a 107 autres provinces qui ne demandent qu'à faire de même. Je ne pense pas que si on scinde les 4 Sœurs en 50, ça tiendra longtemps en ordre. Autant dissoudre le royaume, le renommer la Grande Fratrie... ironisa-t-il.
- Tu penses vraiment qu'il y aurait une telle vague. Franchement, à part Derred, Quyrred et Farrs, elles n'ont pas vraiment avantage à se décentraliser...
- Les Républicains sont assez influents sur Eda...
- Pas au point de soulever la masse. Tu t'occupes bien d'eux Ereb. Cela fait combien... 14 ans qu'il y a pas eu de grand mouvement social ? C'est une monarchie, mais pas un régime totalitaire. Tu les satisfais, Ereb.
- Ecoute... si vraiment ils te harcèlent... annonce-leur que j'y réfléchis sérieusement depuis... depuis la conférence le 13. Dis-leur qu'ils ont été relativement convaincants. Ils l'ont été ; mais ils prêchaient un converti..."

Un long silence s'ensuivit. "Si on fait ça, Kaps, on place en la population une immense confiance... C'est... vraiment risqué.
- Je sais. Mais d'un autre côté ça leur fera peut-être oublier la loi sur les taxes boursières et l'assaut des Rosiers...
- J'avais espéré que sur ce coup on me trouverait une compagne ou un truc un peu moins sérieusement politique. Du people, c'est toujours efficace.
- Oui, mais bon, c'est toi qui refuses les avances et qui pars pour je ne sais quel voyage secret..."

Ereben sourit. La voiture s'arrêta signe qu'ils étaient arrivés. Il y avait pour règle de ne jamais ouvrir la porte de Ereben, c'était toujours lui qui l'ouvrait lui-même quand il le voulait.

"À part ça, tu sais ce que tu as à faire.
- Evidement. Tout est planifié depuis ton discours annuel, comme d'habitude. Tu sais, les gens vont se lasser de... de ce côté "programmé pour le bien de tous", c'est un peu...
- Ils n'ont qu'à le dire. Moi aussi je risque de me lasser du pouvoir. Je m'ennuie.
- Eh bien, fais des conneries, des fantaisies, je sais pas...
- Je crois que je suis en train de faire la pire fantaisie de l'histoire de Nilufer..."

Il ne laissa pas le temps à Kaptue de répondre - il n'aurait de toute façon rien su répondre à ça -, il ouvrit la portière et sortit du véhicule.

"Oh, et euh... la numéro 21-12b. Retarde-la de deux semaines, j'ai besoin de la transaction Derilon sarl. avant que ça devienne illicite.
- Sale... ah, je te hais." répondit Kaptue avec humour tandis qu'Ereben le quittait en rigolant.

Avant d'entrer dans le hangar royal, Ereben se retourna. Un bref sentiment lui donna soudain l'envie de regarder sa planète, son ciel, son soleil, comme si c'était la dernière fois. Il aurait aimé parcourir les si douces dunes de sable rouge de Nil... C'était Nilufer le centre... mais c'était Nil la plus belle, la plus captivante, la plus envoûtante.

Il consentit à entrer dans le hangar. Laetim l'y attendait. Une fois en sa compagnie, il congédia les gardes, techniciens et responsables, leur faisant bien comprendre que la suite relevait du secret d'état. Seul avec Laetim, il entra dans l'ascenseur et descendit au 2ème sous-sol, celui où son chasseur 7.16 personnel personnalisé l'attendait, aux soins d'une équipe spéciale réduite qui le mettait constamment à jour. C'était la première fois depuis 4 ans qu'il allait l'utiliser. Il caressa la carrosserie, qui en soi n'avait rien de spécial par rapport aux autres 7.16, tandis que l'un des membres de l'équipe lui apportait son équipement personnel.

Sa combinaison de pilote, son gilet des FSA, son arme à feu et ses munitions, son bracelet Tessla* et bien-sûr, son bâton (Tessla également). Il enfila les vêtements et jeta nonchalamment le reste à l'intérieur du vaisseau. Se tournant vers l'équipe et Laetim:

"Les gars. Oh! Yaris! Doyle! Ecoutez, s'il vous plait, deux secondes. Y aura sûrement des rumeurs, des questions, probablement dès aujourd'hui - parce que j'ai remarqué que Leiko m'avais suivi. Tout ce tralala, ce n'est pas du secret défense ou du secret d'état, c'est du secret tout court. Entre vous, Laetim et moi. Ne balancez pas."

Un petit rire dans l'équipe. Il se tourna vers Laetim. "A plus, gars." Ils se serrèrent la main à leur façon, puis Ereben monta dans son cockpit. Allumage, décollage.

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* Tessla est une marque d'armes de combat rapproché et de dispositifs de protections à technologie s'apparentant aux champs de forces. Rien à vois avec Nikola Tesla le grand scientifique.

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