(2b) les Règles de l'Art

[ereben]

Salem reçut son nouveau contrat peu de temps après. Il le reçut en main propre après avoir été convoqué à la tour Telnip. Quittant dans la foulée le vaste rez-de-chaussée où il venait rapidement et implicitement d'accepter la mission, il se dirigea vers la bouche de métro la plus proche tout en ouvrant nonchalamment l'enveloppe.

Camélia,

Par la présente, nous vous chargeons d'une mission de type 1
à laquelle vous avez consenti par mutisme. En voici l'intitulé:

Vous donnerez lieu au décès de M. Samus J. Hemett dont la fiche
informative ci-jointe donne tout renseignement citoyen.

La méthode utilisée ne souffre d'aucune condition si ce n'est
la relative discrétion pourvoyant à l'accomplissement
sans dommage et sans omission de cette mission.

Les éventuels témoins doivent être éliminés.
Vous effectuerez cette mission seul.

Vous disposez de: 48 heures pour nous remettre un rapport concis.
Passé ce délai, la mission sera déclarée échouée.

Si vous accomplissez la présente mission, vous
serez rémunéré à hauteur de: 15 000 g.

Bonne chance.

15 000, c'est correct, pensa-t-il bien qu'il espérât mieux. Il fourra les papiers dans sa poche intérieure en entrant dans la rame. Il se regarda brièvement dans la vitre: un visage jeune, simple, basané. Ses cheveux noirs virant au gris foncé étaient coupé court et surplombaient une constante inexpression qui néanmoins exprimait l'absence relative de bonheur de Salem. Il s'assit lourdement sur un strapontin et se laissa transporter près de chez lui.

[ereben]

Par mutisme... pensa-t-il en souriant alors qu'il repérait sans intention le mot sur la lettre qu'il posait sur la table de sa cuisine. En effet, le consentement par mutisme, règle de base en cours à Telnip, consistait en l'approbation implicite qu'engendrait la garde et l'ouverture de l'enveloppe contenant l'intitulé de mission. Pour refuser une mission, qu'en l'occurrence vous ne connaissiez donc pas, il suffisait de la glisser dans la boîte à lettre appropriée, surnommée l'Esquive.

Il jeta son manteau sur le dossier d'une chaise et alla faire des recherches avancées dans le frigidaire. Il en sortit une brique de jus d'orange au bouchon de laquelle il but directement d'un geste quasi robotique - cela faisait penser à la manière d'un alcoolique avec sa bouteille... Il posa la brique sur la table puis ouvrit un tiroir d'où il sortit un paxon. Il emmena boisson et herbe dans son salon, appuya sur le bouton d'une télécommande - ce qui eut pour effet d'activer la lecture de la musique qu'il se passait en boucle en ce moment - et commença à rouler.

Il savait déjà parfaitement comment il allait procéder à sa mission.

[ereben]

Samus Hemett était un carde supérieur d'une entreprise concurrente à l'une, savait Salem, dont ses employeurs étaient de fidèles clients. Or, il aurait récemment eu l'idée lumineuse d'une innovation de taille qui ferait pencher la balance de son côté. Encore inachevé, le projet n'a pas réellement quitté le bureau de Hemett et ne le quitterait sûrement jamais après son meurtre...

Salem aimait savoir pourquoi. Cela lui réussissait plutôt bien dans la mesure où personne ne savait qu'il savait. Cela lui permettait également de déduire qu'il n'était pas seul sur le cas Hemett. Il faisait simplement le sale boulot... Cela lui convenait.

Il n'allait pas attendre 48 heures pour finir le travail. Au mieux, c'était bouclé en 24, au pire en 36. Après avoir parcouru la fiche informative, très complète, il sut parfaitement quand et comment frapper: il était 17h40... il le tuerait le lendemain entre 12h et 13h30, à l'arme blanche, en ville, sans que personne ne le voie.

[ereben]

Le lendemain entre 12h et 13h30, il se réveilla. Un résidu des substance de la veille lui faisaient encore effet.

"Oh merde..." Il était en retard. Il se leva rapidement, ne prit pas la peine de se laver, alla directement chercher ses armes. Ces Deux dagtars, ces dagues effilées, gracieuses et élégantes, attestaient de ses origines et son style oriental. Il enfinla ce qu'il appelait son holster, cet assemblage de sangles, fabriqué sur mesure, lui permettant de ranger ses lames dans son dos, cachées sous son manteau.

Il sortit de chez lui en vitesse, sans prendre la peine de fermer la porte à clé. Il n'était pas parano, et selon lui sans risque, la vie était ennuyeuse. Il n'était pas suicidaire non plus, dans ce genre de boulot, il prenait toujours les précautions nécessaires à sa propre survie. Or, cette mission ne présentait aucun risque pour lui. Aucun danger provenant aussi bien de ses employeurs que de ses objectifs.

Il prit le métro, ayant depuis longtemps constaté que les gens se souciaient tant les uns des autres qu'il pouvait sans craintes se promener avec dissimulées dans le dos des lames arrondies, aiguisées à l'extrême. Il fit surface à 13h22 devant le restaurant où sa cible déjeunait tous les jours.

Il n'était déjà plus là. Il courut alors selon le trajet le plus évident entre ici et son lieu de travail. Il le retrouva dans la 5ème avenue, toujours très peuplée à cette heure-ci. Tout allait pour le mieux. Il ralentit afin de régler sa vitesse pour le rattraper juste au niveau de cette ruelle, là-bas, plus loin... Quand l'homme fut au niveau de ladite ruelle, Salem l'attrapa par l'arrière de son col et l'y entraina vivement.

Samus tomba, déséquilibré par la surprise. Il n'eut pas le temps de se relever que le tueur le prit pour le plaquer au mur. Sans un mot, il sortit l'un de ses dagtars et lui trancha ouvrit la gorge d'où surgit une giclée de sang. Salem savait parfaitement d'où allait provenir le jet, il n'avait même plus besoin de l'éviter: il était déjà placé hors de portée selon un angle précis.

Sans se poser la moindre question, Salem entama une sortie acrobatique de la ruelle qui le mènerait au toit, ce qui lui permettrait de rentrer chez lui ou d'aller à la tour par au moins 14 chemins différents. Arrivé sur le toit, il examina son arme. Bien qu'il le sut déjà, il aimait vérifier pour être certain: il n'y avait pas une goute de sang dessus. Son éducation au maniement de ces bijoux uniques lui avait appris à frapper si vite et si bien qu'il n'y avait pratiquement jamais de trace sur la lame. C'était une question d'habileté et d'entretien soigneux. Il s'appliquait assidument aux deux.

Il parcourut les toits en profitant du soleil.

[Contenu sponsorisé]